vendredi, mars 29, 2024
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Il existe en Iran une alternative démocratique – Rama Yade

« Le sens de l’histoire est avec nous, ne doutez jamais que nous avons choisi le camp de l’humanité et l’humanité c’est de soutenir la fin de la répression dans le premier pays bourreau par habitant du monde », a déclaré Rama Yade, ex-secrétaire d’État chargée des Affaires étrangères et des Droits de l’homme, à une conférence organisée le 16 décembre à Paris sur la question iranienne.

Intitulée, « La situation explosive de l’Iran, le régime des mollahs encerclé par les crises », le colloque au Palais Brongniart a vu la participation de plusieurs personnalités européennes, arabes et Nord-américaines. Elle a été ouverte par Jacques Boutault et Jean-François Legaret, maires du 2ème et 1er arrondissement de Paris, qui ont remis à Maryam Radjavi, présidente du CNRI, l’appel de soutien de plusieurs milliers de maires et d’élus de France à la Résistance iranienne et à son appel à la justice pour les victimes du massacre des prisonniers politiques en 1988 en Iran.

Dans son intervention, la présidente de « La France qui ose » a déclaré :

« Cela faisait longtemps que le monde n’avait pas assisté à une telle accélération des événements au Moyen Orient. Vrai-fausse démission de Hariri au Liban, vaste changement en Arabie Saoudite, reconnaissance américaine de Jérusalem comme capitale d’Israël, missile iranien au Yémen, appel pressant d’Arabie Saoudite à agir contre l’Iran, retrait des troupes de la Russie en Syrie, oui ça faisait longtemps qu’on n’avait pas vu ça, autant de changements. C’est un risque clairement. Tous ces bouleversement sont un risque mais sont aussi une opportunité exceptionnelle de rabattre les cartes.

Notre réunion était donc nécessaire. Car dans le trouble actuel c’est bien l’Iran qui mène le jeu, qui est au cœur des bouleversements du moment et dans ces instants où tout peut basculer. La Résistance iranienne doit prendre sa place. Elle est un acteur majeur, une clé de la solution pour peu que la communauté internationale le comprenne. Des solutions il n’y a pas tant que cela, des acteurs crédibles non plus.

L’anthropologue Margaret Mead disait « Ne doutez jamais qu’un petit groupe d’individus conscients et engagés puisse changer le monde ». C’est de cette même façon que ça s’est toujours produit. Et l’Europe doit aujourd’hui ouvrir les yeux, être digne de cette Résistance iranienne, cesser son silence impuissant qui n’est pas à la hauteur du continent de Jean Monet. Cesser les demi mesures qui amènent sa représentante à l’étranger à peine oser évoquer les questions des droits de l’Homme auprès du régime. Cesser les alliances terroristes qui l’amène entre Daech et Bachar à choisir le second, alors que la solution n’est ni chez l’un ni chez l’autre. Cesser les risques inconsidérés en signant un accord nucléaire avec une dictature iranienne en qui personne ne devrait avoir confiance. Cesser les stratégies à mi-chemin consistant à se tenir Hariri et l’Iran. Cesser les tactiques sans stratégie qui la font naviguer à vue dans une région où elle ne maîtrise plus rien, si ce n’est le déclin inexorable de son influence.

Cesser de jouer avec la démocratie et les droits de l’Homme qu’elle ignore superbement pour d’hypothétiques contrats commerciaux. Aucun doute que le monde y perdra en sécurité et en dignité humaine. L’accord nucléaire c’est un chèque en blanc, le vil prix de la lâcheté internationale. Alors où est l’Europe ? Qu’a-t-elle fait de ce qu’il faisait sa supposée supériorité ? De quelle banalité est-elle désormais le nom ? L’Europe est-elle encore européenne ? Quelle est cette indignité qui lui sert de politique et justifie tous ces renoncements ?

Que Merkel doive construire une coalition pour gouverner l’Allemagne, soit. Que Theresa May doive gérer son Brexit, soit. Que Rajoy doive gérer la crise Catalan, très bien. Mais tout cela, se ne sont pas des excuses valables pour justifier qu’ils gardent les yeux baissés, la bouche fermée et les oreilles closes. Il est temps pour l’Union européenne et en particulier la France, pays des droits de l’Homme, d’adopter une position ferme condamnant les violations flagrantes des droits de l’Homme en Iran, en particulier le nombre élevé d’exécutions, et en soumettant le commerce avec l’Iran à la fin des violations des droits de l’Homme.

Il est temps pour l’Union européenne et en particulier la France, je répète, pays des droits de l’Homme, d’exiger de la Syrie le retrait immédiat des Gardes révolutionnaires et de ses mandataires qui soutiennent les groupes terroristes dans la région. Il est temps aussi pour l’Union européenne et en particulier la France, d’exiger la fin de son programme de missiles balistiques qui viole les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. Et si le régime refuse de retirer ses mercenaires de Syrie et de mettre fin à son programme de missiles, alors il faut imposer des sanctions à l’Iran.

Au cours de quatre premières années de mandat de Rohani, l’Iran détenait le sordide record mondial du plus grand nombre des exécutions par habitant. Le simulacre d’élection présidentielle qui l’a reconduit à la tête du pays ne change rien. Où est la démocratie quand le choix est entre les démagogues et les autocrates ? Où est la démocratie quand la peur, l’intimidation et le chantage règnent partout ?

 

L’indispensable changement 

Puissions-nous être plus nombreux, plus déterminés encore, pour conduire cette indispensable changement ? Nous le devons à ce grand peuple iranien, l’une des plus belles et plus brillantes civilisation que le monde ait portée, en soutenant son désire pour le changement et l’instauration d’une république laïque fondée sur la séparation de l’église et l’Etat, l’égalité des genres et la liberté d’expression. Il en va de la morale et de la sécurité. Quelle morale gagne-t-on avec un Iran pourfendeur des droits humains ? Quelle sécurité gagne-t-on avec Iran qui allume brèche sur brèche dans la région ?

Alors, ici nous ne sommes ni des illuminés ni des doux rêveurs, nous sommes, ou avons été, maires, parlementaires, ministres ou secrétaires d’Etat. Nous savons ce qu’est la diplomatie et ses contraintes. Nous savons que ni Rome ni Téhéran ne se sont faites en un jour. Nous voulons que nos entreprises s’enrichissent évidemment grâce à des accords commerciaux. Nous voulons que nos concitoyens en but avec le chômage, aient des emplois grâce à ces contrats.

Mais allez, puisque tout le monde nous parle en langue…, nous savons que nous n’obtiendrons rien de tout cela en baissant le pavillon sur le front des droits de l’Homme. Il nous arrive d’avoir raison.

Quand j’étais Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et aux droits de l’Homme, deux casquettes qui semblaient incompatibles à tout le monde, je me suis bien opposée dans mon gouvernement à la dérive autoritaire d’un Ben Ali ou d’un Kadhafi. Songez quelques secondes à ce qu’ils sont devenus.

Le sens de l’histoire est avec nous. Ne doutez jamais que nous avons choisi le camp de l’humanité et l’humanité c’est de soutenir la fin de la répression dans le premier pays bourreau par habitant du monde. L’humanité c’est de demander justice pour les quelques 30.000 prisonniers politiques exécutés en 1988. L’humanité c’est de vouloir une commission d’enquête indépendante.

Les Iraniens sont fatigués de se battre seuls. Si nous ne réagissons pas, les héros de la résistance seront isolés. C’est le peuple iranien qu’on risque tout entier de désespérer. L’assouplissement des sanctions et le dégel des avoirs financiers n’ont pas amélioré le quotidien des Iraniens. La crise intérieure est si profonde que régime se réduit aujourd’hui à des luttes de faction.

Il existe en Iran une alternative démocratique. Elle a un soutien populaire, des réseaux en Iran, une plateforme claire. Elle est dirigée par Mme Radjavi depuis de nombreuses années et par-dessus tout, ce mouvement, il est organisé. Il possède la structure nécessaire pour mener le mouvement démocratique vers la victoire et, plus important, vers la direction du pays. La reconnaissance de cette alternative est une priorité et c’est la raison pour laquelle, je souhaite à l’ensemble du mouvement et à Mme Radjavi en particulier, plein succès dans son entreprise. »