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La place des armes nucléaires dans la doctrine militaire des mollahs

Discours d'Ali Safavi, président de Quelles sont les options?

Discours d’Ali Safavi, président de "Near East Policy Research"
Conférence du 12 juillet 2005 – Paris

Depuis l’an 2000, sous la supervision directe du guide suprême, l’ayatollah Ali Khameneï, les planificateurs militaires et les stratèges du régime iranien ont travaillé sur une nouvelle doctrine qui prend en compte les réalités régionales et internationales récentes. Cette doctrine est basée sur le concept de "la guerre asymétrique."

L’obtention de l’arme nucléaire est un élément indispensable de cette stratégie. L’arme atomique représente pour le régime iranien trois avantages essentiels :

1) elle garantit la survie du régime théocratique ;
2) une fois équipé de la bombe atomique, la République islamique deviendra une puissance régionale indiscutable, capable d’exercer du chantage auprès des gouvernements de la région, en particulier de ses voisins arabes ;
3) l’arme atomique donne à la République islamique le statut de Um-ol-Qora, (la mère de toutes les terres islamiques). Ce statut permettra au régime de recruter plus facilement des adeptes extrémistes et d’exporter son modèle de révolution islamiste vers les autres pays musulman.
Deux programmes nucléaires parallèles

Le régime iranien poursuit deux programmes nucléaires parallèles : un programme civil qui est officiel et un programme militaire qui reste confidentiel. Ces deux programmes avancent de façon autonome, ils se déroulent sous le contrôle du guide suprême et d’une poignée de proches conseillers.

L’Organisation de l’énergie atomique iranienne (OEAI) est le principal organe travaillant sur le programme nucléaire civil. Elle est chargée de plusieurs sites : le réacteur à eau légère de Bouchehr, les activités du cycle du combustible nucléaire dont la mine de Saghand, les sites de production d’oxyde d’uranium de Bandar-Abbas et d’Ardakan, ainsi que les installations de conversion d’uranium d’Ispahan.

Le programme civil n’est pas simplement une couverture pour le programme militaire, il lui fournit à la fois une expertise technologique, un vivier d’experts et un accès aux matériaux et aux équipements nécessaires. C’est pour cette raison que l’OEAI se trouve sous la surveillance du Conseil suprême de sécurité nationale.

Le programme militaire se déroule sous le commandement d’un comité supérieur militaire  composé du commandant des forces armées, le général Hassan Firouzabadi, du commandant du corps des gardiens de la révolution, les pasdarans, le général Rahim Safavi, et du ministre de la défense, l’amiral Ali Chamkhani ; tous trois issus des gardiens de la révolution.

Le programme de fabrication des armes nucléaires se déroule sous le commandement des pasdarans et du  ministère de la défense. En fait, au sein de ce ministère, le département en charge du programme est contrôlé par les pasdarans. Le Comité militaire supérieur rend directement compte à la personne de Khamenei.

Le programme nucléaire du régime iranien est divisé en trois projets principaux :
1) production ou fourniture en quantités suffisantes d’uranium hautement enrichi destiné à la fabrication de la bombe atomique,
2) développement des techniques alternatives d’enrichissement,
3) fabrication des armes atomiques et fabrication des vecteurs balistiques capables de transporter ces armes vers leurs cibles.

La chaîne de commandement
Toutes les décisions importantes concernant les programmes nucléaires sont prises avec la pleine participation et l’aval de Khameneï.

L’existence de deux programmes parallèles permet au régime iranien d’en mieux dissimuler le volet militaire et de contrecarrer les inspections internationales. Les activités à finalité militaire sont essentiellement cachées aux inspecteurs de l’AIEA. Les scientifiques et les experts travaillant sur le programme militaire ont un accès complet et sans difficulté à tout le savoir-faire et à tous les équipements du programme civil, mais ceux qui travaillent sur le programme civil ne savent absolument rien du programme militaire.

Les éléments suivants montrent clairement que le régime iranien a l’intention de fabriquer la bombe atomique :
1) Il s’est avéré que le régime iranien utilise des sites secrets pour la production d’uranium hautement enrichi et pour la production de plutonium.

2) Sur différents sites nucléaires, on a trouvé des traces des matériaux susceptibles d’être utilisés dans la fabrication de l’arme atomique.

3) Des expériences effectuées sur le polonium (un neutron initiateur utilisé dans le déclenchement des explosions nucléaires).

4) Des expériences effectuées sur les techniques d’enrichissement au laser (une technologie peu utilisée, très coûteuse mais qui peut permettre de produire efficacement de l’uranium destiné à la fabrication de la bombe atomique).

5) L’existence d’un projet de réacteur à eau lourde dont la taille est trop petite pour produire de l’électricité et trop grande pour servir de centre de recherches civiles. La taille de ce réacteur est idéalement adaptée à une activité de production de plutonium à des fins militaires.

6) Quant aux activités nucléaires, le régime iranien a constamment cherché à tromper la communauté internationale. Ce régime n’a reconnu que de façon très tardive l’existence de ses activités nucléaires secrètes. Il est évident que si elles ne sont pas stoppées, elles aboutiront inévitablement à la fabrication de la bombe.
Que faut-il faire?

Le guide suprême du régime a fait le choix stratégique de poursuivre les projets d’enrichissement d’uranium. C’est dans ce cadre qu’il a décidé de confier le poste de président de la République à Ahmadinejad. Ce choix est très significatif car durant les cinq dernières années, le programme nucléaire de l’Iran a été contrôlé et dirigé par les pasdarans. En tant qu’ancien commandant des pasdarans, Ahmadinejad, était donc la personne appropriée pour finir ce travail.

Alors que les attentats meurtriers de Londres nous rappellent les attentats tragiques de Madrid, Bali, New York et Washington, la question qui se pose aujourd’hui est la suivante : à l’heure actuelle, quel régime représente la plus grande menace pour le monde civilisé? Dans le passé, sept pays ont été montrés du doigt pour leur implication dans des activités terroristes. Deux d’entre eux, l’Irak et l’Afghanistan, ont connu des changements de régime, la Libye essaye de retrouver sa place au sein de la communauté internationale, le Soudan et la Syrie ont adopté un profil bas, la Corée du Nord constitue une menace davantage en raison de son programme nucléaire qu’en raison de son implication dans le terrorisme, et le régime au pouvoir à Cuba a épousé une idéologie que les intégristes musulmans n’accepteront jamais.

Il reste donc un seul régime au monde qui se considère comme le gardien de l’orthodoxie musulmane et qui s’évertue à exporter son modèle intégriste vers le reste du monde musulman. Ce régime n’est rien d’autre que la théocratie au pouvoir en Iran depuis un quart de siècle.

Les mollahs ont resserré leurs rangs parce qu’ils sont confrontés à des pressions aussi bien de l’intérieur et que de l’extérieur. Sentant son régime menacé, Khamenei a jugé que la seule manière de résister aux vents du changement est de s’emparer de tous les leviers du pouvoir.

Dans ce contexte, l’Europe, et en particulier la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne porte sur leurs épaules une lourde responsabilité.

Nous sommes dans un moment crucial. La communauté internationale se trouve confrontée à la perspective de l’obtention de l’arme la plus dangereuse au monde par le régime le plus dangereux au monde. La politique de marchandage envers les maîtres chanteurs qui détiennent les rênes du pouvoir à Téhéran n’a jamais marché dans le passé, il n’y a aucune raison qu’elle marche maintenant.

C’est le moment de vérité : il faudrait soit envoyer tout de suite le dossier nucléaire des mollahs au Conseil de sécurité des Nations Unies, soit se préparer à voir prochainement le parrain le plus actif du terrorisme international se doter de l’arme nucléaire.

La politique de complaisance envers le régime des mollahs a visiblement échoué et il est temps d’en adopter une nouvelle : une politique de fermeté. Cela suppose que l’on soutienne les musulmans anti-intégristes, ceux qui ont fait jusqu’à présent l’objet de nombreuses restrictions en raison de la politique de complaisance avec Téhéran.